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sentiments agrables, et les sentiments dsagrables, c'est--dire la Joie et la Tristesse.
Ds lors il est vident que la joie est le sentiment d'un passage une plus grande
perfection, et la tristesse le sentiment d'un passage a une moindre perfection. Il est
impossible, en effet, que l'me reoive sans rsistance l'ide de sa propre destruction ;
il est impossible que l'me n'aime pas son tre, et ne se rjouisse pas de ce qu'elle
existe plus et mieux. Du moment o l'on comprend que la joie et la tristesse rsultent,
non pas de notre volont, mais des modifications du corps et des ides de ces
modifications, il faut bien que la joie soit le signe de la perfection et la tristesse le
signe de l'imperfection, ou, plus exactement encore, car le sentiment n'est pas
sparable de l'me qui l'prouve, et il est l'me mme modifie, que la joie soit le
passage une perfection plus grande, et la tristesse le passage une perfection
moindre.
Notre joie et notre tristesse sont donc des manires d'tre que nous ne faisons pas,
que nous subissons, qui nous viennent de notre corps, et, par notre corps, de tout
l Univers. Tantt l'me s'explique ou croit s'expliquer clairement la cause de sa joie
ou de sa tristesse, tantt, au contraire, elle se borne subir sa joie ou sa tristesse
comme un fait, avec l'ide trs confuse que le corps en est la cause ; dans ce dernier
cas, on appelle la joie gaiet, si on la rapporte tout le corps, et plaisir, si on la
Alain (mile Chartier) (1946), Spinoza 42
rapporte une partie dtermine du corps ; et l'on appelle mlancolie et douleur les
deux formes correspondantes de la tristesse.
L'me s'efforce, autant qu'elle le peut, d'imaginer les choses qui augmentent la
puissance d'agir de son corps; et lorsqu'elle imagine des choses qui diminuent la
puissance d'agir du corps, elle s'efforce, autant qu'elle le peut, d'imaginer des choses
qui excluent l'existence des premires. Il ne faut pas entendre par l que l'me
augmente volontairement la puissance d'agir de son corps, elle ne le saurait, mais
seulement que l'imagination de choses qui augmentent la puissance d'agir du corps,
et, par suite, la puissance de penser de l'me, est conforme l'essence de l'me et ainsi
est pour elle joie, et que l'exclusion des images des choses qui diminuent cette mme
puissance est insparable de l'existence mme de l'me. Nous n'exprimons rien de
plus que cela en disant que l'me s'efforce de substituer certaines images d'autres ;
l'me ne veut pas cette substitution d'avance ; mais l'me n'existe que dans la mesure
o elle russit oprer cette substitution; quand elle dit qu'elle la veut, c'est comme si
elle disait qu'elle (l me) dure et se conserve, car cette prtendue volont n'est pas
distincte de la conservation et de l'existence mme de l'me. C'est seulement en ce
sens que l'on peut dire que l'me a de l'aversion pour certaines choses.
Nous sommes maintenant en mesure de nous faire une ide claire de l'amour et de
la haine. Lorsque nous joignons la joie l'ide d'une chose extrieure, nous nous
efforons, au sens de ce mot qui vient d'tre expliqu, d'avoir et de conserver prsente
la chose qui est jointe notre joie ; nous disons alors que nous aimons cette chose, ce
qui ne veut pas dire que nous sortions de notre essence pour nous joindre elle, mais
que, en pensant elle, nous affirmons notre essence et notre dure, que nous nous
aimons nous-mmes quand nous l'imaginons, ou plus exactement que nous nous
rjouissons de notre tre en pensant cette chose. Nous dirons donc que l'amour est la
joie accompagne de l'ide d'une cause extrieure, et que la haine est la tristesse
accompagne de l'ide d'une cause extrieure.
Du reste, nos joies et nos tristesses sont lies les unes aux autres de mille faons,
comme sont les modifications corporelles dont elles dpendent. Nos sentiments
supposent toujours des modifications du corps et ils subissent par suite l'effet de la
juxtaposition, qui est la loi du monde des corps. Si l'me a prouv la fois deux
sentiments en mme temps, elle ne pourra prouver l'un sans prouver l'autre. De
plus, mme les choses indiffrentes pourront tre pour elle causes de joie ou de
tristesse, et par suite de dsir ; il suffira pour cela que ces choses soient unies par
l'imagination une chose qui soit pour nous cause de joie ou de tristesse ou objet de
dsir. Il suffit donc que nous ayons pens une chose pendant que nous tions joyeux
ou triste pour que nous aimions ou que nous hassions cette chose.
Alain (mile Chartier) (1946), Spinoza 43
Bien plus, il suffira qu'une chose ait quelque ressemblance avec l'objet aim pour
que nous l'aimions ; qu'une chose ait quelque ressemblance avec l'objet ha pour que
nous la hassions. En effet, ce que les deux choses qui se ressemblent ont de commun
a t imagin en mme temps que nous prouvions la joie ou la tristesse. On
s'explique ainsi que nous prouvions, sans savoir pourquoi, de l'amour ou de la
haine ; et c'est l ce que l'on doit entendre par sympathie ou antipathie. Il rsulte
encore de l que si une chose hae comme cause de tristesse ressemble une autre
chose que nous aimons, nous l'aimerons et nous la harons en mme temps, ou plutt
nous flotterons entre un sentiment et l'autre.
On voit dj combien d'objets divers, et souvent indiffrents nous attachons
notre joie et notre tristesse, et de combien d'vnements nous nous rendons ainsi les
esclaves. Mais nous sommes encore capables d'prouver l'occasion de choses
passes ou futures les mmes sentiments que nous prouvons l'occasion d'une chose
prsente. En effet, l'image d'une chose passe ou future est toujours prsente pour
nous quand nous y pensons ; nous ne la disons passe ou venir que parce que nous
la lions l'ide d'un temps pass ou venir ; en elle-mme l'image d'une chose est
toujours la mme, que la chose soit absente ou prsente, et l'tat de notre corps, au
moment o nous pensons la chose passe ou venir, est le mme que si la chose
tait prsente. Ces sentiments de joie et de tristesse, lorsqu'ils sont accompagns de
l'ide d'une chose venir, s'appellent l'Esprance et la Crainte. Lorsque la tristesse et
la joie sont accompagnes de l'ide d'une chose passe, nous prouvons soit le
Remords, soit une sorte de contentement auquel ne correspond pas de terme spcial. [ Pobierz całość w formacie PDF ]

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